A vous mes ancêtres

 

     Bien avant moi vous fouliez le sol de cette terre, parfois de glaise ou d’argile, parfois de sable ou de roc, d’un pas alerte ou incertain, toujours vous alliez de l’avant.

     Venu d’Auvergne ou de Lorraine, des Ardennes ou d’Alsace, d’Italie ou d’Autriche, aucun obstacle ne vous a définitivement stoppé dans votre marche en avant.

      Fi Des forêts et des champs, des montagnes et des rivières, des frontières ou des guerres, des crues ou des sécheresses, des épidémies ou des malédictions, des joies et des peines vous avez vécu, et pour moi vous vivez !

      Peut-être me voyez-vous faire, et en colère vous pensez, Diantre ! Que diable, Parbleu, mais il nous numérote le bougre! Ne sommes-nous que des numéros à ses yeux ?

      Que nenni mes aïeux, n’y voyez point offense, ce n’est que l’adresse ou vous trouver dans les longues rues bordées d’arbres ou j’aimerais pouvoir vous loger.

       Tous je vous connais, je vous dis, je pourrais vous réciter si ma mémoire parfois ne me prenait en défaut.

       Toi Michel, maçon tu étais, tu habites tout au bout de la première rue à gauche, ton fils Curin à tes coté, Maître maçon de lui tu as fait, à ton second mariage, déjà il signait… Et pourtant Gerbecourt en cette fin 17eme cela devait être éloigné de tout ? Allait-il à l’école, sûrement.

       Mais peut-être pourrais-tu me répondre toi-même Curin, et as-tu fait le tour de France ?

       Quel mal j’ai eu, tu sais, à retrouver ton père ! Et ta mère, dis, tu ne pourrais pas murmurer son nom à mon oreille ? Et ton demi-frère pourquoi donc est-il allé se marier en Haute-Marne ? Etait-il aussi compagnon ?

       Et toi Ferdinand Marie, toi qui loges au 100 de cette rue à droite, pourquoi me tais-tu le nom de ta signora ? Aurais-tu pensé que tes enfants et petits-enfants allaient se distinguer l’épée à la main ? N’as-tu pas tremblé de peur en les voyant s’enrôler ? Quel dommage que je ne pratique pas ta langue ensoleillée !

       Quant à toi Jean Jacques, tu me fais aller jusqu’au 6144 pour te retrouver, dis donc entre nous, les cigognes elles ne migraient pas en ces temps là ! Dis donc comment faisiez-vous sans les allocations ? Et tous instruits, dès le 16eme siècle, chapeau ! Tu dois rager maintenant !

       Mais non vous non plus mesdames je ne vous oublie pas, sans vous serais-je là ?

        Catherine, pourquoi ne me dis-tu pas avec qui tu as eu ton fils, quoi, c’est un secret, hein ! Que me dis-tu, c’est un enfant de l’amour ! C’est tout ce qui compte pour moi.

        Et toi Marguerite, saurais-je bientôt pourquoi tu as quitté ta Corrèze, Oui ? que dis-tu ? Ah bon ! Ce n’est pas toi, seulement ton fils, et encore, pour marier une fille de Corréziens, d’accord je comprends mieux.

        Mais toi Catherine, le tien il a épousé une Cantalou ! Oui, je sais, par ce qu’il s’était placé comme domestique quand l’amour l’a attrapé, et puis ce n’était pas si loin après tout !

        Et toi Zenon, que l’on disait ‘tué’ en 1832, alors que 25 ans après tu vivais encore…

        Et toi Virginie qui a du prouver que tu vivais pour toucher la pension de ton mari…

        Et oui vous voyez, vous m’êtes tous très proches, dommage que l’on ne puisse se faire une bouffe, Oui ? Pardon, un festin devrais-je dire ;-)

        Alors à vous tous je vous dis merci, merci d’avoir vécu, merci d’avoir fait que je sois là aujourd’hui, merci de me permettre de vous garder en vie.

        Une amie a adopté un proverbe africain comme signature : « Quand un ancien meurt c'est une bibliothèque qui brûle ! »

        On pourrait rajouter, « quand un généalogiste naît, c’est un incendie circonscrit » bof ! je sais c’est mauvais L

             Fait un jour, en pensant à vous. Gérard votre descendant de la moitié du XX ème siècle.

 
                                                                                                    Copyright Gérard Hilbert